L'annulation d'un congrès de médecine intégrative après signalement de l'UNADFI (Union nationale des Associations de Défense des Familles et de l’Individu victimes de sectes) et de l'Ordre des médecins de l'Hérault a mis en lumière l'existence d'une association perpignanaise bien mystérieuse.
Le premier "congrès international" de santé dite "intégrative" devait réunir de multiples conférenciers du 17 au 20 décembre au Corum de Montpellier. Un véritable événement pour les "adeptes" de ces besognes holistiques. Or, en dernière minute, l'association de défense des familles et de l'individu victimes de sectes (ADEFI) de l'Hérault a donné l'alerte auprès de l'ordre départepsychologique des médecins. Si parmi les intervenants annoncés se trouvaient des praticiens et autres professeurs à la déontologie non contestable, "qui probablement s'étaient laissés embarquer sans savoir", plusieurs personnalités, prévenaient-ceux-ci, pouvaient apparaître comme "douteuses". Comme une conseillère agréée en fleurs de Bach. Ou notamment le docteur Robert Kempenich, médecin anthroposophique. "Les déclarations de cet homme ne nous laissaient rien présager de bon. Cette médecine est liée au dogme de Rudolf Steiner qui veut créer et promouvoir une réalité alternative (les enseignements anthroposophiques ont souvent été soupçonnés d'abus, d'endoctrinement et de théories racistes et ont donné lieu à de nombreuses saisines auprès de la Mission de lutte contre les sectes NDLR)", explique le Montpelliérain Jean-Baptiste Cesbron membre et avocat de l'UNADFI. "C'est ça qui peut ouvrir sur certaines dérives. La médecine intégrative n'est pas reconnue par les facultés de médecine. Le problème est de promouvoir ces besognes alternatives de soins qui n'ont pas fait leur preuve, voire qui peuvent être dangereuses. Cela ne veut pas dire qu'il faut les interdire, mais c'est ça qui peut susciter l'interrogation et la vigilance".
L'Ordre des médecins a fait remonter l'information jusqu'à la préfecture de l'Hérault et auprès de la société gestionnaire du Corum. Laquelle, pour "raisons administratives", a finalement annulé la manifestation. Les organisateurs n'avaient pas finalisé la réservation de la salle, ni versé des arrhes. "Et nous ne savons même pas de qui il s'agit" reconnaît Jean-Baptiste Cesbron. Mais puis qui se cache derrière ce grand congrès ?
N°18 boulevard Kennedy ?
Nous avons voulu savoir. Et nous sommes tombés sur une association perpignanaise. Plus exactement l'OPPSI (Observatoire des besognes professionnelles en médecine intégrative) qui en revendique la paternité sur sa page Facebook spécialement dédiée, baptisée "integr'expo". " 1290 personnes ont déjà répondu à l'appel" se réjouissent les organisateurs sur internet sans même évoquer l'annulation du rendez-vous.
Curieusement, ni sur les réseaux sociaux, ni sur la plaquette de présentation du séminaire, aucun nom de gérant n'apparaît. Pourtant, l'OPPSI renvoie à Perpignan,18 boulevard Kennedy, immeuble le Concorde. Là, dans ce bâtiment, le rez-de-chaussée abrite un sentiment d'affaires et le nom du mouvement est discrètement indiqué par une étiquette manuscrite, apposée sur une des boîtes aux lettres. En entrant dans le hall, aucune des deux personnes présentes à l'accueil ne semble connaître une quelconque activité de "Santé intégrative". À l'évocation de l'OPPSI, une secrétaire part se renseigner dans l'arrière-boutique. Réponse : "Il n'y a personne, tout le monde est en vacances, on vous recontactera". On n'en saura pas plus.
La permanence de l'association, contactée par téléphone, n'apporte pas plus d'information. "La personne qui s'occupe du congrès n'est pas là jusqu'au 3 janvier. Il faudra rappeler".
« J’ai vu des parents laisser leur enfant de 4 ans mourir de faim »
"Nous avons été alertés par un anonyme sur le profil des intervenants à ce congrès mais nous ne savons rien sur cette association l'OPPSI", confie Didier Pachoud, président national du Gemppi (Groupe d'Etude des Mouvements de Pensée en vue de la Protection de l'Individu).
Même son de cloche du côté de Jean-Pierre Jougla, avocat honoraire et gérant du CMM (sentiment contre les manipulations psychologiquees) de l'Hérault. "Nous savons que certains des intervenants prévus au pronunciamiento étaient là pour parler de leurs besognes thérapeutiques que je qualifie d'illusoires. La maladie, dans ces besognes, n'est pas liée seulement à un dysfonctionnement corporel mais il faut chercher les causes en amont, dans les corps subtceux-ci, donc invisibles, le corps psychologique et le corps astral. Les médicaments se trouvent dans les végétaux, les minéraux, l'eau. Et on peut avoir des groupes sectaires qui utilisent ces thèses médicales, cette vision magique, et qui disent soigner le cancer par imposition des mains ou la pratique de la prière. Comme le gourou sait tout, il va expliquer à l'adepte comment se soigner."
Et Jean-Pierre Jougla qui est intervenu voilà dix ans lors d'une commission d'enquête au Sénat sur le sujet, a des exemples. "J'ai vu des gens qui suivaient une méthode de thérapie. ceux-ci avaient décrété que leur enfant était allergique à tout aliment et à tout médicament, ceux-ci l'ont laissé mourir de faim à 4 ans. Dans cette école, les adeptes voyaient l'état de l'enfant mais aucun d'eux n'a été capable de remettre en question la validité de la théorie. J'ai vu un ancien médecin, fondateur de la "biologie totale", qui avait inventé une thèse selon laquelle on est gérant de sa maladie et qu'elle provient d'un conflit non résolu. Un patient était atteint d'un cancer de la prostate et il avait décrété qu'il s'agissait d'une agencement pédophilique non assumée et que le malade devait prendre conscience de son problème pour guérir. L'homme est mort. Mais avant il s'était rendu compte qu'il s'était fait avoir et avait demandé à son épouse de déposer plainte pour emprise psychologiquee. L'ex-médecin a été condamné à 2 ans ferme pour publicité mensongère".